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Restructuring : Bilan 2023 et perspectives

par Laurent Jourdan,
Associé chez Racine

L’année 2023 est marquée par une augmentation du nombre de défaillances.

Au 31 octobre ce sont 43 740 entreprises qui ont fait l’objet de procédures collectives[1]. Au global, le nombre de procédures collectives augmente de +32,2% depuis le 1er janvier (les redressements judiciaires augmentent de 49,5% et les liquidations judiciaires directes de 34,7%). Si la tendance observée depuis le début d’année se poursuit au cours des deux prochains mois, le nombre de nouvelles procédures collectives devrait, sur l’année, retrouver voire dépasser le niveau de 2019 (52 012 procédures).

Au total, ce sont près de 190 000 emplois qui sont concernés mais 93,7% de ces entreprises emploient moins de 10 salariés.

Des dossiers significatifs ont été cependant concernés (251 entreprises entre 51 et 200 salariés, 66 entreprises entre 201 et 1000 salariés et 10 entreprises de plus de 1000 salariés). 14 ouvertures de procédures collectives dépassent les 100M€ de chiffre d’affaires.

S’agissant de la prévention, 6 268 procédures (mandat ad hoc et conciliation) ont été ouvertes soit une augmentation de +4,4% sur l’année).

L’augmentation du nombre de défaillances correspond en grande partie à une sorte de rattrapage par rapport aux deux années précédentes lors desquelles nettement moins de procédures ont été ouvertes du fait notamment des mesures prises par le gouvernement pour faire face à la crise sanitaire et à la situation en Ukraine. Ces mesures exceptionnelles ont cessé et il est donc logique, dans une certaine mesure,  de constater une augmentation pour revenir à des chiffres comparables aux années précédentes. Les entreprises les plus fragiles, celles qui n’ont pas su ou pu redéfinir leur modèle économique déjà compromis avant la crise se retrouvent dès lors confrontées aux mêmes difficultés sans bénéficier désormais de protection particulière.

Au-delà, les sources d’aggravation des difficultés sont nombreuses : fin du « quoi qu’il en coûte », poids important de la dette, augmentation des taux d’intérêts, inflation, ruptures d’approvisionnement, augmentation des délais de paiement.

Les secteurs les plus touchés sont le retail (Kookai, Burton, la Grande Récrée, Gap France, Go sport, André, …), la construction et l’hôtellerie restauration (Planet Sushi, Courtepaille …).

Parmi les dossiers marquants, on notera par exemple les reprises à la barre de Air Antilles, Iziwork, Maison de la literie.

Deux procédures de redressement judiciaire importantes viennent de débuter à la suite des défaillances de City scoot ou encore d’Habitat.

On retiendra également les deux dossiers totalement atypiques que sont Orpéa et Casino dont les solutions sont implémentées dans le cadre de procédures de sauvegarde accélérée et qui sont riches d’enseignement quant à l’application de la réforme notamment quant au sujet des classes de parties affectées.

Le poids de la dette des entreprises est source d’inquiétude et elles sont nombreuses à devoir la restructurer : refinancement, cession d’actifs, adossements sont impératifs. Selon la Banque de France « le ratio d’endettement brut des sociétés non financières s’élève à 78,4% du PIB ». Parallèlement c’est l’accès au financement qui se fait considérablement plus difficile pour les emprunteurs jugés risqués.

Le secteur de l’immobilier commercial compte tenu de la profonde affectation du ratio dette/occupation est particulièrement touché ces derniers mois au moment des tests de covenants.

La crise oblige à opérer des changements de modèle économique pour ceux qui le pourront au risque, à défaut, de disparaitre.

L’aggravation des difficultés va entraîner des consolidations indispensables.

Le rôle des fonds de retournement est critique d’autant que les acteurs sont trop peu nombreux.

La fin d’année et l’année 2024 s’annoncent donc particulièrement actives sur ce marché.

Plus que jamais, pour le chef d’entreprise, l’attention doit être portée sur le cash et l’utilisation des outils de prévention.

[1] Source : Observatoire des Données économiques du CNAJMJ (Conseil National des Administrateurs et Mandataires judiciaires

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